Publié le : 14/03/17

Du papier au numérique : vers la transformation de la paie (1/2)

La dématérialisation est au cœur des transformations de la fonction paie. Souhaitée par certains, redoutée par d’autres, elle fait l’objet de nombreux débats.

Pour comprendre la dématérialisation, sa nécessité et sa traduction en paie, nous avons échangé avec Mme Isabelle Van Cauwenberge, présidente de la SDDS et directrice juridique au sein de Meta4 France.
Cet article est la première partie de l’interview réalisée avec Mme Van Cauwenberge.

Pourriez-vous nous présenter l’Association SDDS ?

SDDS signifie « association pour la simplification des données des sociétés » Ces dernières années son champ d’action s’est étendu aux logiciels fiscaux et RH.

L’association regroupe 26 membres (dont plusieurs éditeurs qui se sont réunis en un seul groupe ou une seule société) dont les clients produisent 95% des bulletins de paie du secteur privé et une part grandissante des bulletins des agents de droit public.

Notre mission depuis 10 ans est de dialoguer avec les pouvoirs publics et/ou de les alerter, afin que leurs textes puissent être davantage compatibles avec une traduction en paramétrages et développements informatiques. Répartis en groupe de travail, les adhérents se réunissent pour participer à des recensements de questions et d’alertes sur les réformes publiées ou en projet susceptibles d’impacter nos logiciels ; ces travaux sont pilotés par un élu de l’association. A l’heure actuelle, nous comptons 9 groupes de travail.

Que signifie pour vous la « dématérialisation des données » et pourquoi est-elle si importante aujourd’hui ?

La disparition accélérée des déclarations-papier, soit à titre obligatoire (DUCS, DADS N4DS, formulaires fiscaux) soit à titre facultatif (bulletin de paie) oblige tous les acteurs de la chaîne – de l’employeur à l’organisme de protection sociale ou au fisc, du salarié aux partenaires sociaux –  à créer ou accepter des formats et des données standardisés.

Les avantages de cette dématérialisation sont indéniables.  Elle permettra un éventuel gain de temps et de productivité qui profitera de plus en plus à chaque acteur. A terme, elle sera source de fiabilité puisque la production des données sociales ou fiscales est de plus en plus normée donc contrôlée.

Mais cette dématérialisation ne pourra s’opérer que si tous les acteurs sont impliqués dans le changement. Pour que cette transformation vers le digital soit totalement réussie, il faut au préalable que :

  • les lois et la réglementation soient plus claires ; qu’elles contiennent moins d’exceptions et de particularismes, de notions floues ou subjectives.
  • les organismes de protection sociale renoncent à une partie de leur autonomie traditionnelle au profit d’une centralisation et d’un partage de leur politique de collecte et d’exploitation des données des entreprises et des salariés, des organismes publics et de leurs agents ou contractuels.

Cela soulève une double contrainte ; il faut que les OPS poursuivent leurs évolutions en profondeur pour simplifier et uniformiser autant que possible la liste des données collectées ; mais chaque évolution est plus longue à faire aboutir parce que désormais tous les acteurs de la chaine sont solidairement impactés. Il faut donc un effort supplémentaire d’anticipation et de préparation. Le paradoxe est donc qu’il faut réformer dans un contexte où chaque réforme est plus lourde à définir et mettre en œuvre.

  • tous se plient aux contraintes de l’informatique; il ne suffit pas de rechercher ses atouts si attractifs à terme. Il doit y avoir un effort supplémentaire de concertation de la part du gouvernement, des instances de gouvernance ou de représentation des OPS en faveur des éditeurs de logiciel, tout particulièrement leurs équipes R&D. A l’inverse, il faut que nos équipes R&D consacrent des investissements toujours plus importants aux réformes légales, ce qui laisse d’autant moins de moyens à des innovations RH extra-légales.

Du point de vue des entreprises, quels sont les principaux enjeux de cette dématérialisation ?

Plus les pouvoirs publics ont recours à la dématérialisation et à la normalisation obligatoire des documents de paie, plus les performances des logiciels (fiabilité et mise à jour des traitements de paie) deviennent stratégiques au sein des entreprises. Et plus ces fonctionnalités de gestion des obligations de l’employeur sont complètes et sensibles, plus l’entreprise a tendance à externaliser leur développement, hébergement et maintenance.

Aujourd’hui comme les entreprises ont fait appel à des modèles afin d’externaliser leurs « tâches » nécessitant le recours à un SIRH auprès de prestataires, il a fallu développer pour ces prestataires des véritables plateformes, des applications capables d’industrialiser la gestion de la paie pour des entreprises de tailles, d’organisation et de statuts réglementaires multiples

Nombres d’éditeurs adhérents de SDDS sont des acteurs majeurs de cette production de la paie par applications mutualisées ou à tout le moins hautement standardisées.

Ainsi la SDDS devient progressivement un pivot, un interlocuteur privilégié des pouvoirs publics lorsque vient le temps d’élaborer une nouvelle loi ou réglementation;  même s’il y a encore de grands progrès à obtenir dans ce domaine.

Cela modifie considérablement le rôle des éditeurs envers les pouvoirs publics, ceux-ci veulent être impliqués dès la préparation de la loi. L’essor de la SDDS s’est fait sur ce dialogue avec les pouvoirs publics.

Pour en savoir plus sur l’association: http://www.association-sdds.org/